Discrète passation – Joaillerie Houillon
Sans bruit, la Joaillerie Houillon, “cachée“ dans la Cité Plantagenêt, a changé de main. Tout en respectant son histoire et sa tradition.
C’est au lycée que la flamme d’Adélaïde Hugedé s’est allumée : « je faisais un bac en arts appliqués. Dans une matière, il fallait détourner l’usage d’un matériau. J’ai pris le bois de cagettes et j’ai décidé d’en faire un bijou. » Toute petite déjà, Adelaïde a besoin du contact avec la matière : « le dessin ne me suffisait pas ».
“Transcendée“ par cette expérience, elle file après son bac au Lycée professionnel Jean Guéhenno de Saint-Armand-Montrond passer un CAP de bijoutier. C’est durant ces années que la Malouine découvre Le Mans : « je suis venue faire mon apprentissage chez Mercier-Lebaron. » L’envie d’apprendre, de découvrir l’entraîne alors vers l’Institut de Bijouterie de Saumur et un cursus qui durera 8 ans. Elle y apprend le sertissage, effectue une mention complémentaire en joaillerie et s’embarque vers les Brevets de métiers d’art (bijouterie-joaillerie, sertissage, gemmologie…) pour, à chaque fois, un an ou deux de formation et d’apprentissage supplémentaires . En 2010, elle revient au Mans pour trouver auprès de Bernard Houillon son maître de stage. “Retiré“ dans le Vieux Mans, la Maison Houillon est l’une des plus anciennes joailleries de la place mancelle. C’est en 1947 qu’Henri Houillon, le père de Bernard, est venu s’installer rue Saint-Benoît. Depuis 1997, Bernard Houillon a pris un peu de recul et c’est sa fille Mylène Martin-Houillon qui dirige l’entreprise. « Je me suis tout de suite sentie bien », témoigne posément Adelaïde, la nouvelle “maître des lieux“. « Ici, le métier de joaillier est une histoire de passion et de transmission. »
Lorsque Mylène Martin-Houillon décide, elle aussi, de passer la main, c’est tout naturellement qu’elle se tourne vers ses salariés. Depuis quelque temps déjà, “l’apprentie Adélaïde“ a fini son parcours de formation et fait partie intégrante de l’entreprise : « cette demande m’a quelque peu surprise. Sur le coup, j’ai dit non car je ne me sentais pas prête. Mais, après réflexion et en discutant de tout cela avec des proches, j’ai finalement saisi cette opportunité et cet honneur de faire perdurer cet atelier de renom au Mans. » Formée à “bonne école“, la nouvelle garante de la joaillerie peut compter alors sur Hugo Savergne, autre salarié de la boutique, pour l’épauler dans ce défi. « Avec tout le savoir acquis lors de mon apprentissage, je me suis finalement senti autonome, polyvalente et capable de diriger cet atelier. Au départ, je pensais qu’il me faudrait plus de temps pour prendre en charge cette fonction. Tout simplement… »
La préservation de la tradition
A l’arrière de la boutique, l’atelier. Hugo crée une bague très moderne pour un client à partir d’un ancien bijou : « cette personne nous a donné ses orientations. Nous lui avons fait un prototype qu’elle a validé. Après avoir dû retailler la pierre centrale qui était abîmée, je suis en train de finaliser cette bague pour un sertissage double griffe » Ça lime. Ça forge… A côté, Léa, apprentie et élève à Saumur, conçoit un bijou sous le regard et les conseils d’Adelaïde qui, avec la “vieille“ Cavallini, tréfile les lingots d’or qui serviront à faire les bagues. « Depuis toujours la Joaillerie Houillon travaille de la même façon, principalement l’or. “A l’ancienne“, comme diraient certains. Mais il n’est pas question de changer cette tradition, remarque Adélaïde. Même avec l’arrivée des nouvelles technologies, notamment le moulage. Cela fait des bijoux plus denses, donc plus résistants. » Il est bien loin le temps des bijoux en cagettes…