Angélique François – De fil en aiguille
Forte de son vécu dans la haute couture française, Angélique François, artiste d’élégance, a créé son propre atelier au Mans.
Les plus grandes maisons de couture françaises, Angélique François les connaît par coeur. D’Hermès à Chanel, en passant par Courrèges, Thierry Mugler ou Chloé.
Dans son atelier, installées délicatement dans le grenier de sa mancelle, une multitude de boîtes de rangement, estampillées Lanvin, témoins de son passage dans cette vieille maison, créée en 1889. « Pendant des années, j’ai travaillé comme patronnière salariée chez les plus grands. Souvent plusieurs semaines, parfois une nuit. Sur des collections ou juste une robe avant le défilé d’une collection. »
Pour Angélique, tout prend vie rue Saint-Denis lorsqu’elle est étudiante à Formamode . « J’ai d’abord débuté chez George Rech. Puis, je suis entrée progressivement dans l’univers de la haute couture. » Dans ce monde-là, le travail de patronnier-graveur est certainement le plus ingrat. Assistants du styliste qui imagine les collections, chaque grande maison a ses modélistes. Leur job : matérialiser les croquis de ces “penseurs“ pour créer le patronnage de chaque vêtement. Mais de temps en temps, ça coince. « Souvent, les modélistes maîtrisent mal les contraintes techniques. Il faut alors reprendre leurs dessins techniques pour que ça colle. » Dernièrement, Angélique a travaillé pour un défilé Kenzo. « Leur atelier n’arrivait pas à conceptualiser un froncé en oblique sur une robe. »
Son propre atelier
Dans ses books, des dizaines de collections pour lesquelles elle a travaillé avec parfois quelques notes de fierté. « Pour ce défilé Saint-Laurent, c’était un casse-tête afin que ces grandes plumes tiennent quand les mannequins
défilaient. J’ai fini par trouver la solution. »
A force de se creuser les méninges pour les autres, d’être souvent “petites mains“ sans grande reconnaissance, ça use : « Surtout qu’étant très perfectionniste, je m’investis totalement dans chaque projet. » Alors, petit à petit, Angélique a eu besoin d’émancipation. Créer son propre atelier de confection, why not ? « L’idée me taraudait depuis quelques années. Le confinement a tout accéléré. »
Il y a un an, Angélique François Atelier Tailleur crée sa première pièce : une robe pour une amie. « Tout a commencé par une discussion. On a parlé ensemble de ce qui lui plairait puis elle m’a laissé carte blanche. »
Aujourd’hui, tout en travaillant encore ponctuellement pour quelques grandes marques parisiennes, AF souhaite développer sur Le Mans la singularité de son atelier : « j’aime rencontrer les gens, discuter avec eux, les connaître. Je les écoute pour cerner leurs goûts. Ensuite, je leur propose un croquis, des choix de matière avant la remise finale de leur vêtement. »
Que ce soit avec les particuliers, les compagnies de théâtre ou les revues de cabaret, Angélique entend retrouver les valeurs du métier : « C’est pour cela que je me revendique tailleur. J’ai envie que les gens reviennent aux bases. Comme avant, quand on allait voir son tailleur, pour se faire un costume ou une robe. » Mais pour elle, pas question de faire de ses créations des produits de luxe. « Bien sûr que non ! Je veux que mes vêtements soient abordables. Certes, chaque création est unique et réalisée avec des techniques et le savoir-faire du luxe parisien. Mais cela ne doit pas être un frein. J’ai envie qu’une personne, qui aime mes créations, puisse se les offrir. »
A l’Hôtel Leprince , pour le premier shooting d’une partie de ses créations, Angélique est allée au bout de sa démarche : « Mes clientes ont posé avec leur vêtement. »
Une complicité qui en dit long…