Emotion man – Bertrand Guerry
Le réalisateur sarthois Bertrand Guerry porte son premier long-métrage Mes Frères comme il a imaginé sa vie. Dans un voyage émotionnel qu’il a choisi…
Enfant, Bertrand Guerry “s’envolait“. De son petit village dans le Beaujolais, il parcourait à pied 1,5 km pour suivre sa scolarité : « le matin, c’était une grande descente vers la liberté. Le soir, je la remontais en rêvant. » A 14 ans, il se rêve romancier. A 18 ans, le Bac en poche, il part à la Columbia University, en plein coeur de Manhattan, suivre un cursus de danse. Dans cet univers où se mêlent en écho Harlem ou Greenwich Village, Bertrand découvre qu’au delà “de faire“, il aime surtout être le témoin du mouvement : « je me suis alors dégoté une petite caméra. Je filmais d’autres étudiants dansant ailleurs que sur les parquets de l’école. Dans la rue, dans des lieux improbables… » En France, son cadet Thomas, le personnage d’Eddy dans Mes frères, connaît une carrière de danseur de premier plan. « Sans regret, je lui ai laissé cet habit qui lui va si bien. »
Lui, il devient premier assistant réalisateur, travaillant avec son mentor Gaël Morel (A toute Vitesse…), Philippe Grandrieux (Sombre) ou encore Gérard Jugnot (Bodu). Un jour, il souhaite réaliser ses propres longs métrages. « Mais j’ai vite compris que cela allait être très compliqué. Pour y arriver, je me devais de prendre une autre voie. En 2001, j’ai donc monté ma boîte de prod, Mitiki. Et depuis, je m’éclate. » Clips vidéo pour différents artistes (Dust of You pour Black Lilys), documentaires (Je suis bien, je vole), courts-métrages ou publicités, Bertrand touche à tout, tant comme réalisateur que producteur. En 2005, il s’installe au Mans d’où il gère depuis sa boîte de production. Et récemment, il l’a fait : ce grand saut vers le long-métrage.
« Avec mon frère, j’avais imaginé le scénario d’un film Back Home qui se passait sur l’île de Man. Il n’est jamais sorti. Ma femme (Lola dans le fim) a voulu retravailler le script. » Loin des circuits traditionnels, sans aide ni subvention, Bertrand est parti sur son propre “voilier“. « On a décidé avant tout de faire. » Direction l’île d’Yeu. Une prise de contact avec ce bout de terre :
« C’est là que j’ai trouvé Chris Walder qui joue le rôle d’Alan, un Néérlandais venu s’y retirer. » Sept semaines de tournage et une “virée“ au Bebop pour le concert du film. Cinq mois de montage : « avec notamment la complicité du Pathé du Mans pour que je puisse voir certaines scènes en secret et en grand. » Un énorme travail sur la BO,« avec des auteurs, comme Manu Chao que j’ai directement contacté. », Mes Frères est un ovni dans le cinéma d’auteur. « On a surtout essayé de ne rien lâcher lors de ce voyage émotionnel. »
En marge de l’industrie du cinéma français et prévu au départ pour quelques salles, le film (dont 50% des gains seront reversés à la lutte contre la Maladie de l’homme de pierre) devrait être programmé dans plus de 100 salles françaises, voire 200. A Richmond (USA), ce long métrage a reçu deux prix : meilleur scénario et prix d’interprétation pour l’ensemble de la distribution. Respect.